Corot : figures et portraits à Marmottan

Corot – La femme à la perle

Quand on évoque Corot, on pense surtout à ses paysages magnifiques, à la touche presque impressionniste.

Et d’ailleurs, beaucoup pensent que, par sa touche notamment, il en est plus ou moins l’inventeur (avec d’autres).

Mais avec la nouvelle exposition du musée Marmottan « Le peintre et ses modèles », c’est essentiellement la figure et le portrait qui sont mis à l’honneur  (la figure est pour montrer l’attitude & le dessein. Le portrait est uniquement pour la ressemblance – Encyclopédie ou dictionnaire raisonné
des sciences, des arts et des métiers –
)

Le mot clef pour le portrait est sans doute « ressemblance ».

Beaucoup des œuvres présentées ici viennent du Louvre, mais aussi du monde entier. Il y en a une soixantaine

Les modèles en mouvement

Sans doute pour mieux en capter toutes les faces et expressions, les modèles, dans son atelier, n’étaient pas toujours immobiles. A sa demande, il se déplaçaient, marchaient, au grand dam des visiteurs…

 

Corot les portraits et les figures : le mystère

Bizarrement, ses figures et portraits ne furent que peu diffusées. Il ne voulait pas les vendre et ne les montrait qu’à ses amis. Elles ne furent répandues dans le grand public qu’après son décès. Pourquoi ? Il y a là un mystère… Peut-être ne se sentait-il pas assez « prêt » pour les vendre… Beaucoup sont en effet des « essais », esquisses, ébauches, études, exercices, tel ce nu sur lequel il a noté au pinceau, dans la partie supérieure « Marietta Rome » :

Jean-Baptiste Camille Corot – Marietta ou L’Odalisque romaine
1843 – Huile sur papier marouflé sur toile – Paris, Petit Palais, musée des
Beaux-Arts de la Ville de Paris – © Petit Palais / Roger-Viollet

 

Son but était de faire de « grands nus », et il n’en réalisa que très peu qui restèrent souvent au stade de l’essai.

D’autres figures, sont d’absolu chefs d’œuvre, assez émouvants d’ailleurs, tel ce « Vieillard assis sur une malle »

Vieillard assis sur une malle appartenant à Corot 1826
Huile sur papier marouflé sur panneau – Boston Museum of Fine Arts

 

ou le portrait de sa mère réalisé à presque 50 ans :

 

Madame Corot, mère de l’artiste, née Marie-Françoise Oberson – Vers 1835-1840 – Huile sur toile – Edimbourg, National Galleries of Scotland

 

Et cette figure où le personnage semble un peu déprimé, certains ont dit qu’elle était aveugle… Remarquer le rose orangé de la jupe.

Jeune femme à la jupe rose Vers 1845-1850 – Huile sur toile Williamstown, The Sterling and Francine Clark Institute

 

On remarquera la masse de gris-ocre jaune qui entoure ce rose-orangé. D’ailleurs, comme dans ses paysages, pour faire ressortir les gris, Corot mettait souvent une pointe de rouge, généralement au 2/3 de la toile. Ses couleurs semblaient d’autant plus saturées qu’elles étaient entourées de gris. Alors que ses paysages n’ont souvent qu’un petit point de couleur, ses figures et portraits en ont beaucoup plus (en pourcentage du tableau).

Les courants de la peinture, transmis par les modèles

Emma Dobigny, modèle célèbre, travailla pour plusieurs peintres et une transmission s’opérait par son intermédiaire. Ainsi, tel grand peintre lui demandait souvent comment travaillait tel autre, et il y avait donc ainsi une transmission par le modèle ! Sans doute Corot s’est-il inspiré de peintres plus jeunes, tels Manet et Degas.

Ci-dessous, dans le tableau intitulé « Jeune Fille grecque à la fontaine », le modèle en est justement Emma Dobigny

Jean-Baptiste Camille Corot, Jeune Fille grecque à la fontaine, vers 1865-1870 – Huile sur toile,
55 x 39 cm – Legs James N.B. Hill, 1978 – Paris, musée du Louvre, département des Peintures 

 

La femme à la perle

Le titre provient sans doute d’une erreur sur la feuille qu’elle a sur le front et qui fait partie d’une couronne de feuillage. Évidemment, le style rappelle un peu Léonard et le titre Vermeer (peut être un hommage à Vermeer)

 

La sibylle

Le style devient là carrément plus impressionniste. On voit la touche épaisse dans les blancs, unique et définitive. Certains pensent que ce tableau est resté à l’état d’ébauche, ce qui n’est pas évident.

Jean-Baptiste Camille Corot, Sibylle, vers 1870 – Huile sur toile, 81,9 x 64,8 cm – Collection H. O. Havemeyer,
legs de Mme H. O. Havemeyer, 1929 – New York, the Metropolitan Museum of Art – © New-York, the Metropolitan
Museum of Art, H. O. Havemeyer Collection, bequest of Mrs. H. O. Havemeyer, 1929

 

 

Il y a ici beaucoup de chefs d’œuvre mais avec nombre de ces toiles on sent la recherche presque obsessionnelle d’un style moins académique, plus proche de l’impressionnisme. Et l’exposition se termine par un de ses derniers tableaux, peu de temps avant sa mort, la célèbre « Dame en bleu » qui est, encore une fois Emma Dobigny :

Jean-Baptiste Camille Corot, La Dame en bleu, 1874 – Huile sur toile, 80 x 50,5 cm – Acquis sur les arrérages du legs de Maurice Audéoud, avec la participation des enfants d’Henri Rouart, 1912 – Paris, musée du Louvre, département des Peintures

 

L’exposition est magnifique. Il y a une unité, une douceur, dans le passage d’un tableau à l’autre et la scénographie (réalisée par Anne Gratadour) bien que discrète, est en parfaite adéquation avec le style de Corot.

Vous avez jusqu’au 8 juillet 2018.

 

Le musée Marmottan Monet est ouvert tous les jours, sauf le lundi, de 10h à 18h.
Nocturne le jeudi jusqu’à 21h.

2 rue Louis Boilly
75016 Paris

Pour marque-pages : Permaliens.

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