Pissarro « Le premier des Impressionnistes » à Marmottan

Du 23 février au 16 juillet 2017 au musée Marmottan, à Paris se tient une grande exposition monographique (la première depuis près de 40 ans)  à ne surtout pas manquer.

Un hommage à Pissarro (1830-1903), le « premier des Impressionnistes ». Le premier ? Oui et non, car l’impressionnisme est né de la collaboration de plusieurs grands peintres. Et les peintres se copiaient plus ou moins les uns les autres, il leur arrivait même de peindre ensemble ! Sa date de naissance (1830) le mettrait plutôt en tête du mouvement. Mais si l’on regarde ses premières œuvres (comme par exemple « deux femmes causant au bord de la mer »), on voit qu’au départ, il est très loin de l’impressionnisme…

Cézanne (qui fut plus ou moins son élève) dit de lui :

« Pissarro a eu la veine de naître aux Antilles, là, il a appris le dessin sans maître. Il m’a raconté tout ça. En 65, déjà il éliminait le noir, le bitume, la terre de Sienne et les ocres. C’est un fait. Ne peins jamais qu’avec les trois couleurs primaires et leurs dérivés immédiats. Me disait-il. C’est lui, oui, le premier impressionniste. »

 


L’exposition est divisée en sept sections :

1 LES PREMIÈRES ANNÉES, 1855-1865

C’est en 1855 que Pissarro quitte les Antilles danoises, dont il est originaire, pour se rendre à Paris où il suivra les cours de peinture de l’Académie Suisse et où il rencontrera Monet de dix ans son cadet.  Il fera également la connaissance de Corot, Cézanne, Guillaumin.

Le tableau ci-dessous, très académique, montre qu’à ses débuts, il fait preuve d’une excellente technique, sur le plan du dessin et de la couleur, avec notamment ce ciel jaune suggérant la chaleur écrasante…

Camille Pissarro Deux Femmes causant au bord de la mer 1856 Huile sur toile 27, 7 x 41 cm Collection of Mr. and Mrs. Paul Mellon Washington, National Gallery of Art © Courtesy National Gallery of Art, Washington

 

Il admire Corot  et s’en influence, tout en allant plus loin, ce qui l’amène évidemment à l’impressionnisme.

Très tôt, sa technique change et devient complètement impressionniste. On le voit notamment avec ce « jardin de Maubuisson » ci-dessous :

 

Camille Pissarro Le Jardin de Maubuisson, Pontoise vers 1867
Huile sur toile 81, 5 x 100 cm Prague, Národní galerie v Praze Photograph @ National Gallery in Prague 2017

 

Les détails de ce tableau montreront mieux en quoi la touche (un trait de pinceau pour le pantalon du paysan et deux pour la manche de chemise), les couleurs et les contrastes sont impressionnistes :

Camille Pissarro Le Jardin de Maubuisson  Pontoise (détail) vers 1867
Huile sur toile 81, 5 x 100 cm Prague, Národní galerie v Praze Photograph @ National Gallery in Prague 2017

 

Il ne changera de technique que pendant les années 1886 à 1890, pour le pointillisme qu’il abandonnera finalement (et heureusement) pour revenir à l’impressionnisme.

 

2  PONTOISE, 1866-1868 ET LOUVECIENNES, 1869-1872

Très attiré par le Vexin, il peindra souvent dans ces régions, aux confins de la Normandie.

Ci-dessous, une très belle scène d’hiver ou du début du printemps « Gelée blanche à Ennery » :

Camille Pissarro Gelée blanche à Ennery 1873 Huile sur toile 65 x 93 cm
Paris, musée d’Orsay, legs de Enriqueta Alsop, au nom du docteur Eduardo Mollard, 1972
Photo © RMN-Grand Palais (musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski

 

 

3 PONTOISE, 1872-1883

Voici un tableau étonnant par sa ressemblance avec un Cézanne, notamment par le traitement du feuillage et des maisons.

Pissarro 1875 Chemin montant, rue de la Côte-du-Jalet, Pontoise, Brooklyn Museum

 

C’est assez évident dans le détail ci-dessous :

Pissarro 1875 Chemin montant, rue de la Côte-du-Jalet, Pontoise (détail),  Brooklyn Museum

 

  • ÉRAGNY-SUR-EPTE, 1884-1903
À Éragny, Pissarro dira qu’il vit comme « un ermite dans les déserts de la Thébaïde; je ne fais plus attention qu’au temps, aux nuages, au soleil, aux feuilles qui poussent lentement et aux fleurs des arbres fruitiers ». I
 
Il achètera une maison avec un verger en 1884 pour la modique somme de 1000 F., ce qui est très peu même à l’époque. Il y fera beaucoup de figures, de paysans notamment.
 
 

5 LE NÉO-IMPRESSIONNISME, 1886-1890

Durant son séjour à Eragny, Pissarro se lance dans le néo-impressionnisme (pointillisme, divisionnisme) qu’il abandonnera définitivement en 1891. Ci-dessous le « clocher d’Eragny ». Van Gogh (qui était revenu de cette technique, après avoir essayé) disait que la juxtaposition des couleurs donnait finalement une espèce de gris et en tout cas en atténuait la force. C’est particulièrement flagrant chez Seurat. Et puis, cela prend beaucoup plus de temps… Et le temps est l’ennemi du peintre de plein air. D’ailleurs les chefs d’œuvres chez Pissarro sont toujours impressionnistes. 

Voici donc un exemple de pointillisme chez Pissarro avec ce « clocher à Eragny » qui n’a pas été exposé en France depuis 1857 :

Camille Pissarro  La Maison de la sourde et le clocher d’Éragny 1886  Huile sur toile 65 x 81 cm
Indianapolis, Indianapolis Museum of Art, don anonyme, 2002.76 (imamuseum.org)© Courtesy of the Indianapolis Museum of Art

 
Et si l’on regarde un détail de ce tableau, on voit que les couleurs vues de près sont beaucoup plus belles car il ne peut s’empêcher de mélanger les couleurs pour obtenir de plus belles teintes et faire de petites touches, plus des taches que des points d’ailleurs, sur des fonds qu’il a préparé par avance. Il y a comme du Van Gogh…
 

La Maison de la sourde et le clocher d’Éragny (détail) 1886 Huile sur toile 65 x 81 cm Indianapolis, Indianapolis Museum of Art, don anonyme, 2002.76 (imamuseum.org) © Courtesy of the Indianapolis Museum of Art

 

6 LES PORTS NORMANDS, 1883-1903

Il traitera la mer et les ciels d’une façon merveilleuse. Comme à Paris, il peint au deuxième étage d’une chambre louée pour l’occasion et d’où il a plus une vue d’ensemble.

Camille Pissarro L’Anse des Pilotes, Le Havre, matin, soleil, marée montante 1903 Huile sur toile 54, 4 x 65 cm Le Havre, musée d’art moderne André Malraux © MuMa Le Havre / David Fogel

 

 

7 PARIS, 1893-1903

Les chefs d’œuvres de Pissarro, sont sans conteste réalisés à Paris. L’un des plus abouti, le plus riche en couleurs, le plus harmonieux, me semble être le Pont-Neuf. Tout est admirable dans ce tableau qu’on peut regarder  pendant des heures sans se lasser, y découvrant chaque fois de nouvelles merveilles !

Camille Pissarro Le Pont-Neuf, après-midi, soleil, première série 1901 Huile sur toile 73 x 92, 1 cm Philadelphie, Philadelphia Museum of Art Legs de Charlotte Dorrance Wright, 1978
 © Philadelphia Museum of Art, Bequest of Charlotte Dorrance Wright, 1978-1-24

 

Et bien sûr,    » la place du Théâtre Français  » toujours réalisée au deuxième ou troisième étage d’un hôtel parisien tableau dans lequel on peut admirer comment le peu de couleurs vives ressortent grâce à son extraordinaire maîtrise des gris et des ocres.

Camille Pissarro La Place du Théâtre-Français et l’avenue de l’Opéra, effet de pluie 1898 Huile sur toile 73, 6 x 91, 4 cm Minneapolis, Institute of Art, fonds William Hood Dunwoody © Photo : Minneapolis Institute of Art

 

Il y a donc là, au musée Marmottan à Paris, une exposition à voir absolument, avec une soixantaine d’œuvres venues de nombreux pays du monde !

Infos pratiques :

 Musée Marmottan : 2, rue Louis-Boilly 75016 Paris

Accès
Métro : La Muette – Ligne 9
RER : Boulainvilliers – Ligne C
Bus : 32, 63, 22, 52, P.C.

Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h
Nocturne le jeudi jusqu’à 21h
Fermé le lundi, le 25 décembre,
le 1er janvier et le 1er mai
Tarifs
Plein tarif : 11 €
Tarif réduit : 7,50 €
Moins de 7 ans : gratuit

 

Pour marque-pages : Permaliens.

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