Georges Braque au Grand Palais

 Georges Braque, Atelier I 1949. Huile sur toile, 92 x 73 cm. Collection particulière. © collection particulière © Adagp, Paris 2013

Georges Braque, Atelier I 1949. Huile sur toile, 92 x 73 cm. Collection particulière. © collection particulière © Adagp, Paris 2013

18 septembre 2013 – 6 janvier 2014

Beaucoup d’entre vous découvrirons Georges Braque, grâce à la très remarquable exposition du Grand Palais, à Paris.

Beau et décoratif

Les deux mots que les peintres (surtout les contemporains) détestent le plus, c’est sans doute « beau » et « décoratif » !

Pourtant, à cette exposition, ce sont bien ces deux adjectifs qui viennent à l’esprit.

Braque a un sens de la beauté très développé, on est comme « enveloppé » par son art; il modifie la réalité pour la rendre plus esthétique et décorative. D’ailleurs, son père, Charles Braque, peintre amateur, possédait une entreprise de peinture en bâtiments et Georges y a travaillé, avant de rejoindre un entrepreneur en peinture décorative en 1899.

Puis, il poursuit son apprentissage de peintre-décorateur de Paris en 1900. Il apprend, entre autres, à faire du faux marbre, du faux bois, etc.

Il prend la même année des cours du soir de dessin à l’atelier municipal des Batignolles.

Mais comme Braque est avant tout un créateur, il va se servir de la technique acquise pour créer.

Allers, retours et évolution

Georges Braque semble avoir fait de constants allers et retours dans sa carrière, s’essayant au figuratif jusqu’aux limites de l’abstrait, sans d’ailleurs jamais n’y tomber vraiment et revenant ensuite au figuratif un peu plus modifié et un peu plus figuratif. Ses dernières toiles sont assez emblématiques à cet égard et notamment la dernière « La sarcleuse » qui ressemble beaucoup à la dernière toile de Van Gogh « Champ de blé aux corbeaux« …

Il suit les modes, puis les précède, en inventant et en évoluant encore et toujours !

Il commence par se joindre aux fauves. Il peint comme Derain ou Matisse de l’époque. D’ailleurs, quand on pénètre dans la première salle, remplie de ses tableaux fauves, on a l’impression d’assister à une expo de ces deux derniers grands peintres.

Puis, c’est Cézanne et l’Estaque. Plusieurs toiles « cézanniennes » sont exposées ici. On se demande même si le cubisme qu’il a inventé en compagnie de Picasso, ne viendrait pas de là. En effet, on le pressent chez Cézanne.

Et, curieusement, il peint de la même manière « à la Cézanne » Le Sacré Coeur (1909-1910), une toile splendide. Braque et Picasso peignaient ensemble et échangeaient leurs théories, le courant allant plutôt, paraît-il, dans le sens Braque – Picasso… Leur étroite collaboration à Montmartre, où ils habitaient tous les deux, fut journalière, 7 ans durant (1907 à 1914) et ils leur arrivait de ne pas signer leurs toiles pour parfaire la fusion !

Enfin, il invente le papier collé sur toile et fait quelques chef d’œuvres de cette façon. Voir ci-dessous « la Mandoline ». Il a d’abord découpé puis collé un journal, il a fait le manche de l’instrument avec un carton ondulé qui présentait l’avantage de contenir les cordes, etc. Il a dessiné ensuite le reste au crayon et fait l’ouverture noire dans la caisse de résonance  sans doute à la gouache.

  Georges Braque, La Mandoline, 1914. Aquarelle, gouache, crayon, papier collé faux bois et carton ondulé, 48,3 x 31,8 cm. Ulm, Ulmer Museum, prêt permanent du Land Baden-Württemberg. © Ulmer Museum © Adagp, Paris 2013

Georges Braque, La Mandoline, 1914. Aquarelle, gouache, crayon, papier collé faux bois et carton ondulé, 48,3 x 31,8 cm. Ulm, Ulmer Museum, prêt permanent du Land Baden-Württemberg. © Ulmer Museum © Adagp, Paris 2013

 

On verra aussi des peintures sur plâtre gravé et une série ayant pour thème « les Billards », ainsi que la série des « Ateliers ». Il aime aussi intégrer de la matière à sa peinture (sable, limaille de fer) car il pense que le relief de cette matière modifie la couleur C’est magnifique.

Il est mobilisé en 1914 et sera blessé à la tête et trépané en 1915, comme son ami Apollinaire.

Il aime le midi, mais il retournera vers les plages de la Manche dans les années 30.

La sculpture, plus tard

Plus tard, Braque ramassera des galets sur la plage de Varengeville où il possède une maison et il les sculptera, à peine ramassés et terminera l’oeuvre chez lui.

Il y en a quelques unes ici, très belles.

 

Entre les choses

Citation de Georges Braque :

« Ce qui est entre la pomme et l’assiette se peint aussi. Et, ma foi, il me paraît aussi difficile de peindre l’entre-deux que la chose. Cet entre-deux me paraît un élément aussi capital que ce qu’ils nomment l’objet. C’est justement le rapport de ces objets entre eux et de l’objet avec l’entre-deux, qui constitue le sujet. »

Un exemple significatif en est « L’Oiseau noir et l’oiseau blanc », peint en 1960, soit 3 ans avant sa mort; on peut en effet voir l’oiseau noir et l’oiseau blanc, mais entre ces deux oiseaux, on peut y voir les formes étranges de deux demi cercles opposés, d’une couleur rose-mauve pour l’un et jaune pour l’autre, séparés par un gris très légèrement bleu. Le rose mauve est d’ailleurs étonnant, on peut dire qu’il égaye la toile qui, sans lui, serait sinistre.

  Georges Braque, L’Oiseau noir et l’oiseau blanc, 1960. Huile sur toile, 134 x 167,5 cm. Collection particulière. © Leiris SAS Paris © Adagp, Paris 2013

Georges Braque, L’Oiseau noir et l’oiseau blanc, 1960. Huile sur toile, 134 x 167,5 cm. Collection particulière. © Leiris SAS Paris © Adagp, Paris 2013

 

Nous laisserons le dernier mot à Armand Israël, ayant droit et conservateur du musée Braque qui dit sur iTELE du 18 septembre 2013 : « c’est la plus belle exposition jamais faite sur Braque, elle est magnifique ! ».

A voir absolument ! Vous avez jusqu’au 6 janvier 2014.

BIOGRAPHIE DE GEORGES BRAQUE

1882
Naissance à Argenteuil-sur-Seine le 13 mai 1882. Son père, Charles Braque, exploite une entreprise de peinture en bâtiment.
1905
Elève de Léon Bonnat à l’école des Beaux-arts. Au Salon d’automne, il découvre le fauvisme avec les peintures de Matisse, Manguin, Derain, Vlaminck, Marquet, Camoin.
1906
Naissance du Cercle de l’art moderne du Havre. Jusqu’en 1909, Braque, Othon Friesz et Raoul Dufy participent aux expositions annuelles de peintures fauves. En juin, à Anvers, premiers tableaux fauves. En octobre, premier séjour à l’Estaque : « C’est dans le Midi que j’ai senti monter en moi mon exaltation ».
1907
20 mars-30 avril : au Salon des Indépendants expose six paysages fauves. À l’automne, séjours à l’Estaque et à La Ciotat avec des paysages plus cézanniens. Fin novembre, au Bateau-Lavoir, Apollinaire le présente à Picasso.
1908
9-8 novembre : galerie Daniel-Henry Kahnweiler, première exposition personnelle, avec des paysages géométrisés, qui marquent les débuts officiels du cubisme. Le catalogue est préfacé par Apollinaire.
1909
Été à La Roche-Guyon près de Mantes, premiers paysages du cubisme analytique.
1911
Apparition dans la peinture de lettres et de chiffres imprimés au pochoir qui enrichissent le sens et la compréhension des oeuvres.
1912
En Septembre, à Sorgues, création du premier papier collé, Compotier et verre, qui introduit un élément étranger dans l’oeuvre d’art et permet la séparation de la couleur et de la forme.
1913
Naissance du cubisme synthétique. Les peintures intègrent les acquis des papiers collés, en imitent les matières et les signes typographiques.
1914
3 août : déclaration de la première guerre. Braque est mobilisé. Le 14 novembre, il est envoyé au front, dans la Somme.
1915
Le 11 mai, grièvement blessé en Artois, il s’arrête de peindre jusqu’en 1916.
chronologie
Georges Braque 12
1917
La revue de Pierre Reverdy, Nord-Sud , publie ses « Pensées et réflexions sur la peinture ».
1919
5-31 mars : Galerie de l’Effort moderne de Léonce Rosenberg, deuxième exposition personnelle, avec des natures mortes. Début de l’amitié avec Erik Satie.
1922
1er novembre-20 décembre : au Salon d’automne, les Canéphores représentent sa nouvelle inspiration classique.
1924-1925
Collaboration avec les Ballets russes de Serge de Diaghilev : Les Fâcheux. Zéphire et Flore. Salade pour les Soirées de Paris du comte de Beaumont. 2-21 mai 1924: première exposition chez son nouveau marchand Paul Rosenberg.
1925
Atelier construit par Auguste Perret à Paris près du parc Montsouris.
1930
Atelier construit par Paul Nelson, à Varengeville-sur-mer, où il s’installe une partie de l’année
1932
Illustre la Théogonie d’Hésiode pour Ambroise Vollard. Cycle de peintures, gravures et sculptures d’inspiration mythologique
1933
9 avril-14 mai : rétrospective à la Kunsthalle de Bâle. Le catalogue est préfacé par Carl Einstein, auteur de sa première monographie, en 1934.
1939
Installation à Varengeville-sur-mer pendant la guerre. Premiers essais de sculpture, ensemble de vanités austères et symboliques.
1943
Publication par Jean Paulhan de Braque le Patron.
1944-1949
Cycle des Billards.
1946
Nicolas de Staël le désigne comme « le plus grand des peintres vivants de ce monde »
1947
30 mai-30 juin : Première exposition, à la galerie d’Aimé Maeght, son dernier marchand.
Rencontre le poète René Char.
Georges Braque 13
1948
Prix de la XXIVe Biennale de Venise.
1949-1956
Série des Ateliers.
1953
Peint des Oiseaux pour le plafond de la salle Henry II du musée du Louvre.
1954-1962
Série des Oiseaux.
1955-1963
Cycle des derniers paysages de Varengeville-sur-mer.
1963
31 août : Mort de Braque.

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